Markus Sämmer
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Chef cuisinier, écrivain, chasseur, randonneur, cycliste de montagne, alpiniste, surfer… La liste est longue mais ne serait pas complète sans la formule pour connecter tout cela : amoureux de la nature. L’amateur des grands espaces allemand Markus Sämmer pourrait passer des heures à partager ses histoires fascinantes. Du monde de la gastronomie et des étoiles dans le guide Michelin à son expérience en tant que chef privé sur un yacht en Méditerranée, de ses nuits sous le ciel étoilé d’Australie dans son petit van à l’ascension de la Cordillère des Andes au Pérou, Markus est aujourd’hui heureux de mener une vie calme et posée à écrire des livres de recettes, remplis non seulement d’idées pour de délicieux repas, mais également d’histoires personnelles ou de celles d’autres passionnés de l’outdoor.
J’ai grandi à la campagne. Notre maison était entourée de forêt. Quand j’avais trois ans, mon grand-père m’emmenait cueillir les champignons. Et j’ai commencé à pêcher étant encore petit garçon. Le souvenir d’attraper une truite à mains nues en eaux douces refait surface quand je repense à cette époque. J’ai toujours eu cette forte connexion avec la nature.
J’aime l’idée de produire autant que possible par moi-même. J’élève des abeilles, j’ai mes propres poules et je fais pousser des fruits et des légumes dans mon jardin. Je ne suis pas un éleveur, mais j’ai toujours voulu avoir de la viande locale sur ma table. C’est comme ça que j’ai commencé à chasser.
Et oui, vous avez raison, aujourd’hui, ma vie est assez différente de ce qu’elle était durant ma vingtaine. À cette époque, je travaillais dur dans des restaurants étoilés au guide Michelin au sommet de la gastronomie à Munich. J’ai été chef privé sur un yacht en Méditerranée, puis j’ai décidé de lancer ma propre affaire de service traiteur. Mon équipe a grandi jusqu’à pouvoir catering assurer des événements pour 600 invités et plus. Puis un jour j’ai réalisé que je souffrais du même stress que celui que j’avais connu dans les restaurants ! Alors, j’ai fermé mon affaire et j’ai commencé à me concentrer sur un nouveau projet – les livres de cuisine. J’avais déjà cette idée en tête depuis mon aventure d’un an dans les années 2000 pendant laquelle je parcourais l’Australie en van, pour surfer et profiter de la vie.
À cette époque, j’ai ressenti une connexion extrêmement forte avec la nature. Je dormais littéralement à la belle étoile dans mon petit van, cuisinais des repas frugaux et profitais de la liberté que j’avais. Ce fut une incroyable leçon de vie, et cela m’a aidé à réaliser que certaines choses sont importantes et d’autres non. J’ai découvert que je n’avais pas besoin de grand-chose pour être heureux. Passer du temps à l’extérieur, dans la nature, ressentir la connexion avec elle est tout ce dont j’ai besoin.
Markus Sämmer
La vie est faite de plaisirs simples, c’est ça ?
Absolument ! J’essaie de m’inspirer de la nature chaque jour. J’y recherche également de nouvelles idées pour mes recettes. J’adore y cueillir des champignons, des baies et des herbes sauvages.
Qui vous a fait venir à la chasse ?
Il n’y avait pas de chasseurs dans ma famille. En revanche, un voisin et un ami qui vivaient près de chez moi me demandaient constamment pourquoi je ne chassais pas. Je pensais sincèrement que ce n’était pas pour moi. Puis un jour, il y de cela environ sept ans il m’a invité à le rejoindre pour une partie de chasse, et j’ai accepté par curiosité. Je me suis finalement rendu compte que la chasse ne se résume pas à une session de tir ; il s’agit bien plus de se trouver dans la nature, de s’occuper des animaux et de leur habitat, de protéger la faune. C’est ce qui m’a réellement rendu accro, sans oublier le goût incroyable de la viande de gibier.
Quel est votre gibier favori ?
Celui qu’il y a sur le pas de ma porte. Je vis dans le sud de la Bavière, dans un petit village situé près d’un lac appelé Ammersee. Je n’aime pas chasser dans les forêts possédées par le gouvernement car il ne me semble pas que l’on y pratique une chasse juste et responsable. Je suis partisan d’une chasse éthique, saine et responsable. Je préfère les zones privées à dix minutes de chez moi.
Je chasse le plus souvent le chevreuil, le sanglier, quelques lapins, l’oie et le canard. En hiver, lorsque vous pouvez prélever la fourrure, on élimine également des renards qui sont les prédateurs d’espèces d’oiseaux particulières vivant dans des réserves naturelles. Enfin, le sanglier, dont la population grandit rapidement, peut répandre des virus comme la peste porcine africaine. C’est là que le rôle du chasseur devient essentiel.
Que préférez-vous – la chasse en solo ou bien être dans la forêt avec vos compagnons ?
Par-dessus tout, j’aime chasser avec mon chien, mais j’apprécie également la compagnie de mes amis quand nous partons chasser le canard ou l’oie. Je suis invité parfois à des chasses à la courre, mais je dois admettre que je n’en suis pas un grand fan. Je préfère une chasse dans le calme, plus détendu.
Lorsque vous chassez seul, attendez-vous les animaux depuis une tour ?
Si j’y vais seul, soit je grimpe dans une tour, soit je me déplace discrètement dans la forêt. Si je chasse des oiseaux, je construis un abri, je me camoufle, dispose des corneilles en plastique autour de moi et me mets à produire des sons étranges – des appeaux pour appeler les oiseaux. La corneille n’est pas mon plat favori, mais il est important de contrôler sa population car elle est un prédateur pour d’autres oiseaux, elle détruit leurs nids, dévaste leurs œufs et s’attaque même aux petits lapins.
Au plus vous regardez en profondeur, au plus vous comprenez le déséquilibre qu’a créé l’homme dans la nature. En particulier dans des pays très peuplés comme l’Allemagne. Avec la propagation du coronavirus, les personnes ont commencé à quitter les villes pour la campagne, ce qui pousse la faune à quitter son habitat. Il y a quelques semaines, j’ai vu à travers ma caméra des promeneurs nus dans la forêt… On dirait que le monde devient fou. Les animaux sont dérangés par ces nouveaux-venus, ils sont obligés de se cacher plus profondément dans la forêt et ne peuvent plus sortir la journée pour se nourrir, ce qui rend la chasse plus difficile.
C’est principalement prendre soin de la nature. Je possède un bout de forêt, je sais donc comment tout est connecté avec la nature. J’aime tout simplement être à l’extérieur et aider à préserver cet équilibre. Je suis également grandement reconnaissant envers la nature car elle me permet de ramener à la maison la meilleure chose qui existe – la viande sauvage. Pour moi cela n’a jamais été quelque chose d’acquis, c’est plutôt un quelque chose d’exceptionnel que de prendre un chevreuil, le ramener à la maison, s’occuper de la viande, et de finalement préparer un bon repas avant de le savourer. C’est de cette façon que devraient être les choses – nous devrions soit être végétariens, soit être capables d’apprécier la viande la plus naturelle qui existe.
Certains chassent uniquement pour la viande, d’autres pour se changer les idées, d’autres encore pour trouver de nouvelles idées. Et vous ? Est-ce que les nouvelles idées de recettes jaillissent dans votre esprit pendant que vous vous promenez dans les bois ?
Un peu des deux ! Parfois de nouvelles idées surviennent dans ma tête pendant que je suis assis à attendre. Mais d’autres fois c’est un moyen de complètement vider ma tête du stress en ne faisant rien, simplement en étant assis, à écouter les sons de la nature, le chant des oiseaux. C’est tellement différent de nos rythmes de vie à toute vitesse remplis de sons de téléphone et de publications Instagram… Je suis heureux s’il n’y a pas de réseau dans la forêt même si ce n’est pas toujours recommandé en cas de besoin. Autrement, j’éteins tout simplement mon téléphone.
Quel est votre moment préféré pour chasser ?
J’aime être dans la forêt le soir quand le ciel s’obscurcit. J’aime également les matinées d’été, même s’il est assez terrible de se réveiller à 4 heures du matin… Mais une fois que vous êtes sur place, c’est tout bonnement magique. Pour certaines espèces d’animaux, comme le sanglier, vous devez chasser la nuit. C’est là que les appareils à vision nocturne Pulsar vous viennent en aide. J’ai un module frontal de vision numérique nocturne Forward F455S que j’apprécie vraiment beaucoup. Sans cela, je ne pourrais tout simplement pas repérer et chasser les sangliers par des nuits sans lune.
Vos aventures de chasse seront bientôt compilées dans un nouveau livre, dédié à la viande de gibier. À quoi ressemble le processus d’écriture d’un livre ?
C’est très difficile et ça demande beaucoup de temps. Tous mes livres sont en quelque sorte des autobiographies. Le premier, “The Great Outdoors”, était axé sur les recettes de camp avec de nombreux récits sportifs parlant d’escalade, de bloc, de randonnée et de VTT. Je voulais inclure des acteurs de la scène sportive, comme l’ancien champion du monde d’escalade glaciaire Markus Bendler, dont l’histoire est racontée dans le livre. J’essaie d’entourer mes recettes d’histoires pour créer une expérience de livre culinaire différente.
Le deuxième livre, “The Great Outdoors : Winter Cooking” était dédié aux repas d’hiver. Il est illustré avec des photographies d’un séjour au ski que j’ai effectué en Géorgie et en Norvège. Je me souviens que les montagnes du Caucase étaient recouvertes de 3,5 mètres de neige – le décor hivernal parfait !
Je fais la même chose avec mon prochain livre sur la chasse – j’essaie de recréer le sentiment que procure la chasse. Il y aura des interviews de chasseurs professionnels pour signifier l’unicité de ce métier compliqué et fou. Il y aura également l’histoire de l’un de mes amis, un chasseur qui fabrique des vêtements en cuir très fonctionnels pour chasseurs et amoureux de l’outdoor. Ce sera donc bien plus qu’un simple livre de cuisine, comme mes autres livres jusqu’à présent.
Je pense que ça arrive par chance. Ou avec un grand projet, en arrivant à anticiper les tendances. Mon premier livre était planifié avec attention mais il est également sorti au parfait moment, avant que le coronavirus ne frappe. Il s’est vendu rapidement car des personnes du monde entier cherchaient des idées d’évasion, à retourner vers la nature. Je réalise toujours une bande-annonce pour mes livres – ça vous donne l’impression de faire partie du décor. Mais surtout, le produit en lui-même doit être unique et attirer l’œil. Les recettes que je partage sont pour la plupart respectueuses de l’environnement, biologique et simples à préparer. C’est très différent d’une cuisine de restaurant. Mon dernier livre “The Great Outdoors : Hello Nature” a reçu la médaille d’argent au salon du livre de Francfort où les derniers livres de grands auteurs comme Jamie Oliver et Ottolenghi étaient présentés. Il a reçu une grande couverture médiatique.
Est-que la sensation de liberté que vous aviez en voyageant à travers l’Australie ou en vivant sur ce bateau en Méditerranée vous manque ?
Les voyages, passer du temps dans un nouveau pays, découvrir de nouvelles choses, mener une vie parfois pas très confortable… tout cela me manque énormément. Mon dernier grand voyage était en 2011. Je suis allé au Pérou et j’ai gravi six montagnes de plus de 6000 mètres d’altitude. Je m’étais entraîné plus d’un an pour ce voyage, en planifiant le parcours et toute la nourriture nécessaire, ma connaissance des affaires m’a beaucoup aidé. Je dois l’avouer, ces moments d’évasion me manquent beaucoup. Je pense que l’Alaska ou la Namibie seraient parfaits pour la prochaine aventure…